Montréal, le 11 mai 2022 — L’Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec (OOAQ) et l’Association du Québec pour enfants avec problèmes auditifs (AQEPA) déplorent le fait que seulement la moitié des bébés au Québec ont accès au Programme québécois de dépistage de la surdité chez les nouveau-nés (PQDSN), un an jour pour jour après l’adoption d’une motion unanime par l’Assemblée nationale enjoignant le gouvernement à parachever son déploiement d’ici la fin de 2021.
Annoncé en grand en 2009 et accueilli favorablement, tant par le milieu de la santé que par les familles, le déploiement du PQDSN n’est toujours pas complété. Près de 13 ans plus tard, ce retard est inexcusable, car il porte préjudice et hypothèque lourdement le développement et l’avenir des enfants ayant une surdité non dépistée à la naissance.
Le Québec loin derrière
Alors qu’en Colombie-Britannique, 97 % des bébés sont dépistés à la naissance et qu’en Ontario ce pourcentage s’élève à plus de 94 %, le Québec se classe très loin derrière. Selon les plus récentes données du ministère de la Santé et des Services sociaux, seulement 53 % des bébés au Québec sont dépistés à la naissance, soit 42 284 sur 80 145 naissances. « Ce bilan est gênant et inacceptable, d’autant qu’il s’agit d’un programme qui mise justement sur la prévention et la détection précoce devant permettre de pallier les problèmes. Au fil des ans, ce sont des milliers d’enfants et leurs familles qui se sont ainsi vus privés des bénéfices de ce programme », a d’abord réagi Paul-André Gallant, président de l’OOAQ.
Iniquités régionales et impact sur le développement
Encore aujourd’hui, plusieurs régions ne sont pas desservies. De futures mères résidant en Outaouais préfèrent se rendre en Ontario pour donner naissance à leur enfant parce qu’elles savent que celui-ci y sera dépisté. D’autres parents doivent se battre et attendre plusieurs mois pour obtenir un diagnostic ou bien se résoudre à aller au privé. C’est sans compter le fait que même après 13 ans, certains parents découvrent encore la surdité de leur enfant à l’âge de 2 ans et parfois bien plus tard, parce qu’il présente certains retards de langage faute de dépistage précoce.
« Le contact de l’enfant avec son environnement sonore est pourtant primordial. Il lui permet d’acquérir la parole et le langage, mais aussi de développer ses habiletés sociales et d’assurer son plein développement cognitif et socioaffectif. L’enfant qui présente une surdité, qu’elle soit légère ou sévère, est ainsi privé d’une source d’apprentissage importante qui va au-delà des aspects de la communication orale, et qui peut entraîner des conséquences importantes sur son parcours scolaire, sa vie sociale, son épanouissement personnel, son avenir », a souligné Claire Moussel, directrice générale de l’AQEPA.
La surdité, un phénomène loin d’être marginal
La déficience auditive est le deuxième trouble le plus fréquent avec le trouble visuel chez les enfants de moins de 5 ans. Chaque année, de 4 à 6 bébés sur 1000 naissent avec une perte auditive. Notons également que plus de 90 % des enfants qui naissent avec une surdité sont nés de parents entendants, qui ne soupçonnent donc aucunement cette possibilité.
Passer de la parole aux actes
Au fil des années, les retards se sont accumulés et les explications pour tenter d’expliquer la lenteur et les ratés du déploiement de ce programme se sont multipliées. Or, le dépistage de la surdité chez les nouveau-nés est somme toute simple à réaliser et ne demande que peu de temps. Les retards ne peuvent être seulement attribuables à la COVID-19 ou à la pénurie de main-d’œuvre, les statistiques des autres provinces canadiennes l’illustrent très bien.
« Compte tenu des piètres résultats obtenus après toutes ces années, il faut conclure que malgré les engagements et les promesses répétés par tous les gouvernements depuis 2009, personne n’a réellement pris le leadership dans ce dossier. Même une motion, pourtant adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale il y a un an, aura eu bien peu de poids pour inverser cette tendance lourde à l’inertie, déjà présente bien avant la pandémie. Il est urgent de passer de la parole aux actes et chaque parti représenté à l’Assemblée nationale doit prendre l’engagement formel de terminer le déploiement de ce programme le plus rapidement possible. Il en va de l’avenir de nos enfants », a conclu le président de l’OOAQ.
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À propos de l’OOAQ
L’OOAQ contribue à l’amélioration de la qualité de vie de la population québécoise en s’impliquant dans différents dossiers publics en lien avec la santé et l’éducation. Comptant plus de 480 audiologistes et 3000 orthophonistes, l’Ordre a pour mission d’assurer la protection du public au regard du domaine d’exercice de ses membres soit l’audition, le système vestibulaire, le langage, la voix, la parole, la communication et leurs troubles. Il est notamment chargé de contrôler l’accès aux professions d’orthophoniste et d’audiologiste, de soutenir le maintien et le développement de la compétence de ses membres et de surveiller leur exercice professionnel.
À propos de l’AQEPA
L’Association du Québec pour enfants avec problèmes auditifs est un réseau d’associations régionales de familles, de jeunes adultes vivant avec une surdité et d’alliés, soutenues par une association provinciale ayant pour mission de favoriser et promouvoir l’inclusion sociale des jeunes vivant avec une surdité par le développement de leur plein potentiel.