Extrait du numéro 214 de la revue Entendre : La surdité en milieu scolaire
Par Karine Michaud, personne-ressource pour difficulté et déficience auditive et langagière de la Côte-Nord – CS Estuaire
Le matin de la rentrée scolaire, Léo, un grand garçon de 5 ans entre enfin à l’école. Depuis le temps qu’il attend cette journée. Sa maman, qui l’accompagne, est nerveuse, car elle craint pour son petit. S’il n’entendait pas son enseignante, s’il se faisait intimider par les grands ou s’il perdait une de ses prothèses auditives dans la cour d’école. Elle a tant de choses à dire à son enseignante qu’elle a peur d’en oublier.
L’enseignante l’accueille avec une assurance apaisante. Elle explique à la mère qu’elle a reçu une séance d’information sur la surdité avant la rentrée des élèves et qu’elle a déjà préparé sa classe en conséquence de la surdité de Léo.
Discutant avec la mère, elle lui fait part des stratégies qu’elle mettra en place pour optimiser la compréhension verbale de son enfant. La mère rassurée discute, quant à elle, des habitudes implantées à la maison lors des échanges en famille. Afin de poursuivre leur bonne communication, chacune convient de garder un contact par écrit dans l’agenda de Léo.
Voici une histoire que bien des parents d’enfant ayant une surdité vivent à travers la Côte-Nord.
Les quatre centres de services scolaire du territoire : de l’Estuaire, du Fer, du littoral et de la Moyenne Côte-Nord privilégient l’intégration scolaire en classe régulière. Avant même que l’enfant arrive au préscolaire, on aura préparé l’équipe-école à accueillir l’enfant. Par la suite, on accompagnera les enseignants, la direction et la garderie tout au long de son quotidien scolaire. Ce « on » représente une équipe variée de professionnels.
Chacun aura un rôle bien précis dans la vie scolaire de l’enfant et ce, sans oublier la complicité très précieuse des parents.
Faisant partie des équipes de professionnels des centres de services scolaire, mon mandat sera de construire un environnement favorable et de conscientiser le personnel dans le but d’optimiser la réussite scolaire de l’enfant tout au long de son cheminement du primaire et du secondaire.
Travaillant pour les services régionaux de soutien et d’expertise en adaptation scolaire pour la déficience auditive et langagière, mes tâches seront de sensibiliser le personnel scolaire sur la surdité et d’outiller les enseignants au niveau des stratégies d’enseignement. Par exemple, je leur démontrerai l’importance d’enseigner le vocabulaire qui risque d’apporter une confusion avant l’enseignement d’un concept.
Mon rôle sera également de soutenir et d’accompagner la direction avant une rencontre pour un plan d’intervention. Nous réfléchirons sur certains moyens à mettre en place comme l’utilisation d’un portable pour la prise de notes pour un adolescent ayant un doigté rapide sur les touches, l’utilisation d’un système MF en classe ou la formation d’un éducateur pour développer l’oralisme ou le gestuel. Auprès des centres de services scolaire, j’apporterai des idées nouvelles fondées sur des recherches récentes d’ici et d’ailleurs portant sur des thèmes pédagogiques et technologiques auprès de la clientèle ayant une surdité.
Avec les professionnels du Centre de protection et de réadaptation de la Côte-Nord, nous réfléchirons sur les obstacles rencontrés en cours de route et discuterons des pistes de solution. De plus, étant moi-même une personne sourde, je partagerai mon vécu auprès de la famille et de l’enfant sur mon passé scolaire et sur ma vie quotidienne.
En privilégiant ainsi l’intégration dans les classes régulières et non adaptées, ces enfants ont l’avantage d’être entourés de modèles linguistiques diversifiés.
Bien que nous vivions dans une région éloignée, nous sommes fiers de permettre à ces enfants de bénéficier d’une même qualité de service avantageusement comparable à celle proposée dans les régions urbaines.